lundi 30 novembre 2009

Le reproche à un ami



Que l'on fasse un reproche à un ami, non par zèle ostentatoire mais par sentiment de charité. Que l'avertissement ne soit pas dur, ni le reproche outrageant.

Ambroise de Milan, De officii, III, XXII, 133-134.

dimanche 29 novembre 2009

Une rivalité de bienveillance


L'amitié est en effet une vertu, non pas un bénéfice, car elle est engendrée non par l'argent, mais par l'agrément, non pas par une mise aux enchères des avantages, mais par une rivalité de bienveillance. Enfin, les amitiés des indigents sont bien souvent meilleures que celles des riches, et fréquemment les riches sont dépourvus des amis que les pauvres ont en grand nombre. Il n'y a pas, en effet, d'amitié vraie, là où il y a la trompeuse flatterie.

Ambroise de Milan, De officii, III, XXII, 134-135.

samedi 28 novembre 2009

Je suis tout à toi


C'est un réconfort en cette vie, certes, que d'avoir à qui ouvrir son coeur, avec qui partager des choses cachées, à qui confier le secret de ton coeur ; que de t'assurer un homme fidèle, pour te féliciter dans les jours heureux, compatir dans les jours tristes, t'encourager dans les persécutions. Cette parole facile s'entend souvent : "Je suis tout à toi", mais elle n'engage que peu de choses.

Ambroise de Milan, De officiis, III, XXII, 132.

vendredi 27 novembre 2009

Aimer gratuitement

Tu ne dois pas aimer un ami pour qu'il te donne quoi que ce soit, de l'argent ou quelque autre avantage temporel : ce n'est pas lui que tu aimes, mais ce qu'il te donne. Un ami doit être aimé gratuitement, pour lui-même, non pour autre chose. Mais si la règle de l'amitié, qui veut que tu le chérisses gratuitement, est pour toi une contrainte, combien gratuitement doit être aimé Dieu, qui ordonne que tu chérisses l'homme ! Rien n'est plus à chérir que Dieu !

Augustin d'Hippone, Sermon 49.

jeudi 26 novembre 2009

L'amitié de raison


L'amitié charnelle est due à la similitude des habitudes de vie, des entretiens, des conversations entre deux amis, et elle est telle que l'un est dans la tristesse lorsqu'il est quitté par l'autre, avec lequel il est habitué de s'entretenir et d'avoir commerce : les deux se rencontrent, se promènent ensemble durant trois jours, et même alors ils ne peuvent pas se séparer. Or cette amitié est honnête, mais c'est une amitié d'habitude, non de raison, car les bestiaux eux-mêmes en ont de telles. Deux chevaux mangent ensemble, ils ont besoin l'un de l'autre jour après jour, et quand l'un part devant, l'autre se hâte derrière ; désirant - pour ainsi dire - son ami, à peine peut-il être contrôlé par son propriétaire : il se cabre avec fougue jusqu'à ce qu'il ait rattrapé l'autre. Mais il y a une amitié, supérieure, qui n'est pas d'habitude mais de raison, par laquelle nous aimons un homme au nom de la foi et de la bienveillance mutuelle en cette vie mortelle. Que l'homme commence à aimer tout ce que nous trouvons de supérieur, de divin, et il n'aimera rien en l'homme, si ce n'est Dieu.

Augustin d'Hippone, Sermon 49.

mercredi 25 novembre 2009

Mieux vaut...

Celui qui est indulgent n'est pas toujours un ami, ni celui qui fustige, toujours un ennemi. Mieux vaut aimer avec sévérité que tromper avec douceur.

Augustin d'Hippone, Lettre 93.

mardi 24 novembre 2009

L'amitié pour l'âme folle


Est une amitié parfaite celle qui nous fait aimer davantage ce qui est meilleur et moins ce qui est inférieur. Aime une âme sage et parfaite dès que tu la vois, et une âme folle, non pour sa folie, mais parce qu'elle est capable de perfection et de sagesse. Car on ne doit pas s'aimer pour sa folie : quiconque s'aime de cette façon ne progressera point vers la sagesse.

Augustin d'Hippone, De vera religione, XLVIII, 93.

lundi 23 novembre 2009

Comme un médecin


Sois comme un médecin : le médecin n'aime pas le malade s'il ne déteste pas la maladie ; il s'attaque à la fièvre pour en libérer le malade. N'aimez pas les vices de vos amis, si vous aimez vos amis.

Augustin d'Hippone, Sermon XLIX, 6.

jeudi 19 novembre 2009

L'amour désintéressé


L'amour désintéressé, qui augmente à mesure qu'il est partagé, renferme le vrai bonheur. L'amour désintéressé ne trouve le repos parfait que dans un amour parfaitement réciproque, car il sait qu'on ne trouve la vraie paix que dans cet amour-là. L'amour désintéressé consent, pour le bien de l'aimé, à être aimé de façon désintéressée, et, ce faisant, il se perfectionne.

Donner son amour, c'est donner la faculté et la capacité d'aimer, et c'est en donnant pleinement l'amour qu'on le reçoit. Aussi ne garde-t-on l'amour qu'en le donnant, et ne le donne-t-on parfaitement que lorsqu'on le reçoit.

Thomas Merton, Nul n'est une île, Editions Seuil, 1956, p19-20

mercredi 18 novembre 2009

Christ est amitié

Christ est vérité et amitié. C 'est la raison pour laquelle tous ceux qui possèdent la connaissance du Christ sont amis les uns des autres.

Evagre Le Pontique

mardi 17 novembre 2009

Celui qui aime vit davantage


L'amour devient une force transformante d'une intensité quasi mystique. Il dote ceux qui aiment de qualités et de capacités telles qu'ils n'avaient jamais pensé pouvoir les posséder. D'où viennent ces aptitudes ? De l'accroissement de la vie même, approfondie, intensifiée, exaltée et spiritualisée par l'amour. Aimer n'est pas simplement une façon particulière de vivre, c'est la perfection de la vie. Celui qui aime vit davantage, il est davantage lui-même qu'avant d'aimer.

Thomas Merton

lundi 16 novembre 2009

Quand le Seigneur définit l'amitié


"Le Seigneur définit l'amitié de deux manières. Il n'y a pas de secrets entre amis : le Christ dit tout ce qu'il entend du Père ; il nous donne sa pleine confiance, et, avec la confiance, il nous donne aussi la connaissance. Il nous révèle son visage, son cœur.
"Le second élément par lequel Jésus définit l'amitié, est la communion des volontés."

Cardinal Ratzinger, Ouverture du Conclave, 18 avril 2005.

dimanche 15 novembre 2009

Pour porter du fruit


"Pour porter du fruit il faut goûter la joie de l'amitié"... "L'on peut attribuer à l'amitié ce que l'on a pu dire de la charité : que Dieu est amitié, et quiconque demeure dans l'amitié demeure en Dieu et Dieu en lui. L'amour est la source de l'amitié ……n'estimons pas qu'il n'y a nulle différence entre la charité et l'amitié. Il y en a plusieurs : l'autorité divine nous oblige à comprendre dans la charité plus d'hommes que notre amitié n'en embrasse. Nous sommes contraints par la loi de la charité d'accueillir dans notre amour nos ennemis et nos amis, et nous disons nos amis ceux seulement auxquels nous osons confier notre cœur et ce qu'il contient, y étant liés par la loi d'une même confiance."
Aelred de Rielvaux

samedi 14 novembre 2009

Une confiance justifiée



Même si on doit user de bienveillance et de bienfaisance envers le prochain pour concevoir de l'amitié pour lui, quand on ne fait pas confiance à son prochain en lui réciproquant l'amour et l'amitié qu'on reçoit de lui, l'amitié ne peut être complète et stable. Dès lors, pour qu'une ferme prédisposition à l'amitié puisse naître chez quelqu'un, il est nécessaire qu'il confie à son prochain les choses comme il les sent en lui-même par rapport à lui, ainsi que Tullius le dit dans le De amicitia : "Le fondement de cette fermeté, de cette stabilité que nous demandons à l'amitié, c'est la confiance justifiée ; où elle manque, il ne peut y avoir de stabilité". Pour que la bonne foi soit présente dans sa perfection, les amis doivent ouvrir leurs cœurs l'un à l'autre, comme nous le lisons dans le même livre : "A moins qu'on ne lise, comme on dit, dans le cœur d'un ami, qu'on ne lui ouvre le sien, il n'y a pas de sûreté". Par ce moyen, tout soupçon de feinte et de désaccord est écarté, ce qui est absolument requis pour le développement d'une amitié parfaite. Comme dit encore Tullius : "Il appartient à l'homme de bien d'observer ces deux règles de l'amitié : d'abord d'écarter toute feinte, toute simulation ; en second lieu, de ne pas se contenter de repousser les accusations portées contre son ami, mais de n'être pas soi-même soupçonneux", grâce à quoi tout litige est éliminé de l'amitié.

Henri de Gand.

vendredi 13 novembre 2009

Le partage de la vertu

Vouloir du bien à quelqu'un ne suffit pas pour faire naître la prédisposition à l'amitié envers lui. Une seconde action doit suivre, qui procède de la bienveillance. Par celle-ci, on agit à l'égard de son prochain de telle sorte que la vertu puisse arriver à être partagée avec lui en même temps que les autres biens qu'on veut avoir en commun avec lui. C'est pourquoi il est écrit dans l'Ethique au livre IX : "Un ami se définit comme voulant et faisant du bien". Et Tullius dit, dans le De amicitia : "C'est là un exemple à proposer à tous : si l'on se trouve posséder quelque supériorité de vertu, d'esprit, de situation, il faut y faire participer ses proches, qui s'en trouveront un peu grandis eux aussi".

Henri de Gand

jeudi 12 novembre 2009

Bienveillance

La bienveillance paraît être le commencement de l'amitié : il n'est pas possible d'être amis sans avoir d'abord éprouvé de la bienveillance l'un pour l'autre.

Aristote, Ethique à Nicomaque.

mercredi 11 novembre 2009

Une trinité de personnes


Dans l'amour mutuel, rien n'est plus précieux que de vouloir que l'autre soit aimé autant que soi-même par celui que l'on aime suprêmement et par lequel on est suprêmement aimé. Ainsi deux amis qui s'aiment déjà l'un l'autre requièrent quelqu'un qui partage, dans les mêmes termes, l'amour qu'ils montrent l'un envers l'autre. Et c'est ainsi que l'accomplissement de la charité requiert une trinité de personnes.


Richard de Saint-Victor, De Trinitate, III, chap. 2

mardi 10 novembre 2009

Prière pour les amis



Je te prie, Dieu tendre et bon, pour ceux qui m'aiment à cause de toi et que j'aime en toi. Je te prie avec plus de dévotion pour ceux dont tu sais plus sincère la dilection envers moi, et la mienne envers eux. Je ne le fais pas, Seigneur, comme un juste, rassuré quant à mes péchés, mais soucieux d'une certaine charité pour les autres. Aimes-les donc, toi la source de dilection, toi qui me prescris et me donnes de les aimer. Même si ma prière ne mérite pas de leur être utile, parce qu'elle t'est offerte par un pécheur, qu'elle vaille pour eux, parce qu'elle est faite sur ton ordre, et que tu en es l'auteur. A cause de toi, donc, toi l'auteur et le donateur de la charité, à cause de toi et non de moi, aime-les et faits qu'ils t'aiment de tout leur coeur, de tout leur esprit et de toute leur âme, pour qu'ils disent, veuillent et fassent cela seul qui te plaît et leur est bon.


Trop tiède, mon Seigneur, trop tiède est ma prière, parce que peu fervente est ma charité. Mais ne leur mesure pas ton bienfait, toi qui es riche en miséricorde, selon la torpeur de ma dévotion : de même que ta bienveillance surpasse toute humaine charité, que ta réponse, de même transcende l'affection de ma supplication. Fais pour eux, fais d'eux, Seigneur, ce qui leur est bon selon ta volonté, pour qu'ils soient partout et toujours régis, protégés, par toi, jusqu'à ce qu'ils parviennent à la glorieuse, à l'éternelle sécurité, Toi qui vis et règnes, Dieu, pour tous les siècles des siècles.

Amen !


Anselme de Cantorbery

lundi 9 novembre 2009

Ton ami est l'image de ton Dieu



Aime ton Dieu, et en ton Dieu aime ton ami, qui est l'image de ton Dieu, comme lui-même peut, en aimant pareillement Dieu, t'aimer en Dieu. Si tous les deux vous cherchez et visez le même unique objet, vous serez toujours unis l'un à l'autre, car vous aurez vos racines dans cet objet. Et je ne vois pas comment il se pourrait, si des corps réunis dans un même endroit peuvent être présents l'un à l'autre, que des coeurs fixés sur un unique objet puissent ne pas être unis.


Claudien Mamert, Sur le statut de l'âme, Livre I, chap. 27

dimanche 8 novembre 2009

Qu'est-ce qui me charmait ?

Qu'est-ce qui me charmait sinon d'aimer et d'être aimé ? Mais je ne me contenais pas dans la mesure de l'échange qui va de l'âme à l'âme : là est le lumineux sentier de l'amitié. Des brumes s'exhalaient du limoneux tréfonds de la concupiscence de la chair et des jaillissements de la puberté. Elles obnubilaient et offusquaient mon cœur qui ne distinguait plus l'affection apparente du brouillard du désir.

Saint Augustin, Confessions, II, II, 2-3.

samedi 7 novembre 2009

Comme une visitation


Je peux difficilement imaginer meilleure façon de comprendre l'amitié, l'attention prévenante aux autres et l'amour que celle que nous propose la "Visitation" de Marie. Dans un monde rongé par la honte et la culpabilité, nous avons besoin de nous "visiter" les uns les autres et nous offrir un lieu où il est possible de proclamer notre liberté et de célébrer les dons que nous avons reçus. De temps à autre, il faut pouvoir nous éloigner des voix méfiantes et haineuses et nous retrouver dans un endroit où nous sommes pleinement compris et aimés. C'est à cette condition que l'on pourra affronter à nouveau le monde hostile, libéré de toute crainte et avec une confiance renouvelée en nous-mêmes.

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004.

vendredi 6 novembre 2009

Agitation intérieure

Cet après-midi, je suis allé conduire Jonas à l'aéroport. Cela nous a fait du bien de passer quelques jours ensemble. J'ai eu la possibilité de lui parler de l'anxiété que j'éprouvais, et qui est toujours présente mais invisible extérieurement. Il m'a écouté avec une oreille attentive et m'a répondu avec délicatesse. Mon agitation intérieure s'est quelque peu apaisée, mais je me rends compte que chaque fois que cette blessure intérieure est ravivée, la guérison est lente et il me faut faire preuve de beaucoup de patience. La présence rassurante et réconfortante de Jonas m'a tout au moins permis d'expérimenter un début de guérison.

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004, mardi 7 mai.

jeudi 5 novembre 2009

Je suis anxieux


Pour une raison ou une autre, je suis anxieux. Je me rends compte que je tourne en rond aux prises avec des émotions profondes que je n'ai pas pris le temps d'analyser et qu'il faudrait peu de chose pour les faire remonter à la surface et me déséquilibrer. Je ne m'attendais pas à cela, mais je me sens passablement démuni en face de ces sentiments d'amour, de haine, de rejet, d'attirance, de gratitude et de regret qui sont hors de mon contrôle. J'aimerais bien pouvoir retrouver une nouvelle paix intérieure, mais après toutes ces années, je crains qu'il en résulte plutôt de nouvelles tensions. Je sais l'importance de la prière en pareille situation.

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004, samedi 4 mai.

mercredi 4 novembre 2009

Cette amitié pénètre toute notre vie


Ce soir, Nathan et moi sommes sortis pour dîner et avons profité de l'occasion pour avoir une conversation franche et honnête sur les hauts et les bas de notre relation d'amitié.

Notre amitié a vu le jour en France et s'est solidifiée durant la première année. Plus tard, à Daybreak, de multiples tensions ont surgi, et parce que je suis devenu trop dépendant, notre amitié s'est brisée. Cette brisure a déclenché beaucoup de choses en moi, et la douleur de notre séparation a été tellement vive que j'ai dû quitter la communauté durant six mois afin de retrouver la confiance et l'espoir. A n'en pas douter, ces mois d'éloignement ont certainement été les plus durs et les plus éprouvants de ma vie. Durant cette période, je me suis même demandé si je retournerais un jour à Daybreak et si je pourrais à nouveau vivre dans la même communauté que Nathan.

Au moment opportun, je suis retourné à Daybreak et peu à peu notre amitié s'est renouée et même approfondie. Aujourd'hui nous sommes profondément liés dans l'amitié et cette amitié pénètre tout, notre vie de foi, notre travail comme responsables de Daybreak, notre engagement au service des autres.

Au cours du dîner, Nathan m'a incité à passer moins de temps à me plaindre et à être plus positif. "Quand tu acceptes une invitation, ne te plains pas que tu es trop occupé, et quand ça va bien, ne passe pas de remarques qui laissent entendre que tu as besoin qu'on s'occupe quand même de toi". J'avais pourtant l'impression que je ne me plaignais plus, que c'était réglé, mais Nathan me faisait comprendre qu'il n'en était rien et que cela m'empêchait de pleinement goûter la paix et la joie qui étaient miennes.

Et bien, voilà de quoi réfléchir et sur quoi travailler.

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004, vendredi 29 mars.

mardi 3 novembre 2009

Dépendant de l'affection d'autrui


De ce temps-ci, je me sens d'attaque, débordant d'énergie. Cependant, je suis bien conscient que ce bien-être, je le dois à mes amis et à l'amour dont ils m'entourent. Et autant que je le sache, il n'y a personne actuellement qui m'en veut ou qui serait en colère contre moi. Une douce harmonie règne, me semble-t-il, dans mes relations avec ma famille, avec les gens de Daybreak, tout particulièrement avec Nathan et Sue, et avec mes amis qui vivent à proximité de moi ou éloignés. En pareille situation, j'oublie facilement ma grande fragilité intérieure, j'oublie qu'il faut très peu de chose pour rompre cet équilibre. Il suffirait d'un simple rejet ou d'une légère critique pour me faire douter de ma valeur personnelle et me faire perdre confiance en moi.

C'est à cela que je pensais quand j'ai lu le poème que Michel-Ange a rédigé à l'intention de Tommaso Cavalieri, le jeune noble romain rencontré pour la première fois en 1532, alors qu'il avait 57 ans. Son amour pour Tommaso et l'affection que Tommaso lui portait le faisait se sentir pleinement vivant. Il écrit : "Dans tes yeux brillants, je vois la lumière vive que mes yeux aveugles seuls ne parviennent pas à voir ; et tes pieds assurés me soulagent de ce fardeau que mes pas chancelants laisseraient choir immanquablement. Mes pensées intimes prennent forme dans ton cœur".

Ces mots font naître en moi de profonds sentiments. Ils révèlent à quel point je suis dépendant de l'affection et de l'amour des autres. Je sais le nombre de mes pensées qui ont pris forme dans le coeur de ceux qui m'aiment.

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004, mercredi 20 mars.

lundi 2 novembre 2009

Enracinés dans le coeur de Dieu


Ce matin, à l'Eucharistie, nous avons discuté du grand commandement. La même idée a refait surface. Quand nous aimons Dieu de tout notre cœur, de tout notre esprit, de toutes nos forces, et de toute notre âme, nous ne pouvons pas faire autrement que d'aimer notre prochain et de nous aimer nous-mêmes. C'est en étant pleinement enracinés dans le cœur de Dieu que nous pouvons être connectés de manière créative aussi bien à notre prochain qu'à notre moi profond. Dans le cœur de Dieu, nous pouvons voir que les autres humains qui vivent sur terre avec nous sont aussi fils et filles de Dieu, et font partie de la même famille que nous. Et dans le même mouvement, je peux me reconnaître aimable et le célébrer avec mes proches.

Notre société cherche à tout calculer, y compris l'amour donné à Dieu, aux autres et à soi-même. Mais Dieu, lui, nous dit : "Donnez-moi tout votre amour et je vous donnerai d'aimer votre voisin et de vous aimer".

Henri J. M. Nouwen, Journal de la dernière année, Editions Bellarmin 2004, vendredi 15 mars.

dimanche 1 novembre 2009

Tu m'es devenu un frère


Par la grâce du Christ, tu es devenu mon frère pour m'aider dans le monde présent, pour vivre avec moi dans l'éternité ; tu es mon frère, dont l'amitié dépasse les affections charnelles, un frère plus proche que tous ceux qu'unissent à moi les liens de la chair et du sang. Où sont maintenant mes frères de sang ? mes anciens amis ? mes camarades d'autrefois ? Pour tous ceux-là, j'ai disparu dans l'oubli. Je suis devenu, comme le dit le psaume "un étranger pour mes propres frères, un inconnu pour les fils de ma mère ; mes amis, ceux qui étaient autrefois mes proches se sont éloignés de moi" (Ps 68, 9 et 37, 12). Comme le fleuve qui coule, comme le flot qui passe, ils passent à côté de moi, ils ont honte de moi et ils rougissent, comme il est écrit (Ps 37, 12), de venir me voir. Des étrangers sont devenus mes proches et ceux qui étaient mes proches se sont éloignés de moi. (...) Le Seigneur a voulu que tu me tiennes lieu de père, de frère et d'ami : il a voulu que tu prennes soin de moi avec la sollicitude des parents, que tu m'aimes avec l'affection d'un frère, que tu t'occupes de moi avec le dévouement d'une amitié sincère, que, du fond de ton cœur, tu me prodigues toute ton affection, enfin, que tu me sois continuellement présent par de fréquentes lettres et que tu m'apaises par de douces consolations.

Paulin de Nole à Sulpice Sévère, Lettre 11.